1981, Fela Anikulapo Kuti arrive avec un nouveau groupe, Egypt 80, qui remplace Africa 70, et qui développe les conceptions musicales de son leader, dans lesquelles jazz, high life, ju-ju et soul font bon ménage et se marient pour donner le jour à ce qu’on a coutume d’appeler Afro-beat. Claviers, percussions, guitares et cuivres, solos de saxophone, groove et transe alliés à des paroles hautement politiques entrent dans l’alchimie d’une musique que Fela affirme comme arme du futur. En s’opposant au pouvoir militaire de son pays, il devient le musicien fétiche du petit peuple de Lagos. Celui qu’on appelle désormais The Black President s’en prend dans cet album à la corruption, aux grandes firmes internationales (International Thief Thief), à l’oppression imposée au peuple africain par la conjonction des intérêts des colonisateurs économiques et des pouvoirs corrompus et dictatoriaux qu’ils installent et soutiennent. Les morceaux-fleuves (un quart d’heure, minimum) qu’il propose s’ouvrent sur des introductions au clavier, installent un groove obsédant ponctué de riffs de cuivres et de chœurs omniprésents, de chorus instrumentaux qui scandent leurs refrains-slogans. Comme le disait Léo Ferré, « Les plus beaux chants sont des chants de revendication ». Cet album d’Anikulapo Kuti en est l’illustration.