
Premier dimanche du mois, on va au musée d’art contemporain de Nîmes, sûr et certain d’y entrer en profitant de la gratuité offerte aux amateurs d’art près de leurs sous ou peu fortunés… Las, la règle a changé. Des années après la fin de la gratuité de la médiathèque (mise en place par une municipalité de gauche attentive à l’accès du peuple à la culture, mairie communiste il me semble, et il n’y a là aucune propagande pour ce parti moribond, et annulée par un maire de droite réaliste, à qui nous passons le bonjour…), peu de temps après l’ouverture du Musée de la Romanité, payant pour tous comme il se doit, c’est au tour du Carré d’Art de ne plus offrir la culture aux administrés de cette bonne ville, ne serait-ce qu’une fois par mois ! Quant aux chômeurs et aux étudiants, ils ont droit à un tarif réduit. Gageons qu’ils seront de moins en moins nombreux à tenter l’expérience de l’art contemporain… Les profs ? Ces passeurs de culture qui font venir leurs classes dans les musées paieront eux aussi leur prospection pédagogique. Honte à la mairie de Nîmes ! Honte aux bourgeois qui ont voté pareille mesure ! Souhaitons leur que leurs musées dépérissent et que leurs batailles électorales à venir soient payées de l’insuccès qu’ils méritent. Mais passons…
Peter Friedl expose donc au Carré d’Art. Artiste autrichien vivant en Allemagne, Peter Friedl est né en 1960. Familier de la Documenta de Kassel, en Allemagne, où il est régulièrement invité, il est aussi exposé en France (Marseille, Nîmes) et jouit visiblement d’un succès certain dans le milieu de l’art contemporain européen. Cela n’empêche pas le quotidien Le Monde de l’éreinter (« son oeuvre apparaît hélas aussi indigente que son discours se veut sophistiqué. »), ce qu’on peut comprendre en sortant de l’exposition. Pourtant, dès la première salle (Teatro Popular), ça commence plutôt bien, avec quatre barracas qui rendent hommage au théâtre de marionnettes portugais du XVIIIe siècle. Rien de grandiose, mais une belle occupation de l’espace, une installation qui se laisse voir sans déplaisir. Au sol, deux costumes grandeur nature pour adultes qui rêvent encore, comme au temps de leur enfance, de se déguiser en animaux. Trois salles sont ainsi occupées par ces costumes. Dans la salle suivante, sur des tables hautes, douze maquettes d’habitations (que le descriptif de l’expo détaille sans pitié : « la maison d’enfance de l’artiste en Autriche (…), la modeste résidence d’Ho Chi Minh à Hanoï », etc..) occupent l’espace, qu’elles partagent avec une vidéo très courte et assez illisible, filmée de nuit, de violences urbaines. Le spectateur qui voudrait en savoir plus ne peut lire les cartels de l’exposition, inexistants. Nous ne discuterons pas de ce parti pris, c’est un choix de l’artiste. Le descriptif fourni par le musée du Carré d’Art pallie ce manque. Les trois pièces suivantes se voient sans trop s’attarder (quatre marionnettes, une salle de dessins « indigents », dirait sans doute Le Monde, et nous avec, et une vidéo sur le rêve, inspirée d’une lecture de Friedl, Rêver sous le IIIe Reich, de Charlotte Berard.
En changeant d’aile dans le musée, on tombe sur une salle où, sur des socles de cirque, sont disposés des costumes de pirates, avec sabres et pistolet (référence aux lectures de Friedl sur l’histoire de la piraterie). L’installation laisse indifférent, mais moins sans doute que celle de la salle suivante dont nous ne ferons pas le compte rendu, de peur d’ennuyer le lecteur. Ni de la dernière, consacrée à une vidéo dans laquelle des acteurs disent le texte d’une nouvelle de Kafka (Compte rendu pour une académie) dans leur langue ou une langue de leur choix, sans sous-titrage. La sortie n’est plus très loin. Peter Friedl a exposé à Nîmes. Tarif : 8 euros. A vous de voir.