
« J’aime l’idée qu’on puisse définir un livre comme un rêve de pierre (l’expression est de Baudelaire) : « rêve » par la liberté qu’il exige, l’inconnu, l’audace, le risque, le fantasme, « de pierre », par sa consistance, ferme, solide, minérale, qui s’obtient à force de travail, le travail inlassable sur la langue, les mots, la grammaire. Quand on a trop le nez dans le manuscrit, l’œil dans le cambouis des phrases, on perd parfois de vue la ligne du livre. Or, j’aime me représenter le livre comme un ligne. J’aime cette abstraction, où la littérature rejoint la musique, et où la ligne du livre ondule, monte, descend au gré de pures questions de rythme. » Jean-Philippe Toussaint, L’Urgence et la patience (2012)