
Deuxième film du réalisateur italien, Mamma Roma est un coup de maître qui confirme que Pasolini est très vite un immense cinéaste. Un noir et blanc et des plans magnifiques, Pasolini sait déjà tout filmer, les personnages (principaux autant que secondaires), la ville et l’architecture, les terrains vagues aussi bien. Mamma Roma est une prostituée gouailleuse, dont le maquereau se marie (ce qui la libère). Elle s’installe dans un quartier populaire, façon quartier avant l’heure, et tient un étal sur le marché. Objectif : faire de son fils un jeune homme « bien ». Mais celui-ci traîne avec des petits délinquants et s’encanaille un peu. Tous les moyens sont bons pour lui faire suivre le droit chemin, y compris le chantage exercé aux dépends d’un restaurateur qui accepte de prendre Ettore comme serveur, mais le jeune homme n’aime ni l’école, qu’il a vite quittée, ni le travail, qu’il quitte encore. La plus grande partie du film est portée par l’excellence du jeu d’Anna Magnani, sa verve, son rire, ses monologues ou ses dialogues, son personnage de pute au grand cœur avec laquelle se plaisent à déambuler les hommes qui surgissent auprès d’elle dans la nuit des lieux de tapin pour l’accompagner en écoutant ses souvenirs et en riant de sa gouaille, se relayant autour d’elle. Puis, on suit son fils, on retrouve son ancien souteneur qui est toujours en quête d’argent et compte sur la bonne volonté de Mamma Roma. La fin du film bascule du profane au sacré, consacrée qu’elle est à la brutale déchéance d’Ettore, qui vit une passion christique fatale, et la dernière scène à la passion d’une Mamma Roma, le tout filmé admirablement et accompagné par la sublime musique de Vivaldi. Un très grand film, parmi les nombreux chefs-d’œuvre de Pier Paolo Pasolini que la maison Carlotta propose en versions restaurées. Un bonheur à ne surtout pas manquer.