
Monde post-apocalyptique dans lequel les survivants ont muté au point de ne plus avoir grand-chose d’humain, lutte entre deux Eglises, la spécialité de Zelasny, personnages à la K. Dick de camés, tous les ingrédients d’un bon livre de SF sont réunis dans ce bouquin écrit à quatre mains (et quelles mains !). Pour l’Eglise des Serviteurs de la Colère, adorateurs du Deus Irae, dieu de la colère est le seul vrai Dieu. C’est bien sûr Lui qui a déchaîné la foudre atomique sur le monde en guerre, mettant ainsi fin à la troisième guerre mondiale. Quant à l’Eglise chrétienne, elle est devenue minoritaire. Au milieu de tous ces êtres mutants, une personne handicapée, ni bras ni jambes, Tibor McMasters, peintre en quête de son génie, qui se déplace grâce à un étrange engin porteur d’un système extenseur I.C.B.M. et tiré par une vache blanche et noire, une Hollstein figurez-vous, part à la recherche du Deus Irae pour en faire le portrait que l’Eglise lui a commandé. Bien évidemment, les chemins ne sont pas très confortables, pas vraiment carrossables et la voiture à deux roues de Tibor mériterait un peu d’entretien. Plus on s’éloigne de la ville, et plus les mauvaises rencontres risquent de se multiplier : le Grand C. ou l’extension féminine de son extension péripatétique, ce qui ne vaut pas mieux, des mutants de l’espèce des lézards, des rolliers, des coureurs, des mutants taupes, ou encore les insectes, un chasseur, jolie faune des temps d’après. C’est ainsi que de rencontre en rencontre, parfois dangereuses, Tibor mène son odyssée, obligé de se faire dépanner par un autofac détraqué pas commode. Puis il est rejoint par Pete Sands, de l’Eglise chrétienne, et par Jack Schuld, un chasseur, aussi inquiétant que dangereux. L’homme que cherche Tibor, Lufteufel, incarnation du Deus Irae, est aussi celui que cherche Schuld. Les voilà donc qui voyagent ensemble. L’un aura son modèle, l’autre sa proie. S’ils le trouvent, évidemment.
Deus irae se savoure comme un bon livre de SF à l’univers imaginaire riche de surprises toutes plus délirantes les unes que les autres, qui se lit sans souci de quête d’un sens caché, même si le propos sur la religion, le bien et le mal, la nature d’un Dieu humain de la colère peut sans doute laisser supposer que l’effort d’écriture des deux écrivains est allé plus loin que de créer un monde fantastique réussi. Ce dont je me suis grandement satisfait.